CHARLES (3)

Charles a reçu hier les résultats de ses examens. Au labo où il a été les faire, on n’avait pas le nécessaire pour tester le COVID-19. On lui a trouvé des transaminases deux fois plus élevées que la norme. Il est demeuré une heure dans sa chambre, en proie à une crise d’angoisse. Si ce n’est le COVID-19, cela pourrait être un cancer. Il brandit la feuille où sont marqués ces chiffres, et où celui qui l’inquiète se détache en caractères gras. Je ne sais que dire. Je lui dis qu’il n’a vraiment pas l’air de quelqu’un qui souffre du cancer.

Cela pourrait être, poursuit-il, l’effet du Paracétamol qu’il a pris en grande quantité lorsqu’il avait mal à la nuque. Je me raccroche à cette branche. On va se promener. Je lui promets de lui parler de mes angoisses hypocondriaques – mais le moment venu, je suis tourmenté par autre chose (l’insatisfaction de n’avoir pas conclu, cet après-midi, mon écriture du matin comme je l’eusse souhaité), et la conversation s’enlise dans des plages de silence. Il les remplit comme il peut, en faisant des commentaires sur le beau temps ou ce quartier que nous découvrons, qui ressemble à un décor de cinéma.

J’arrache à ma grisaille des anecdotes, ressassées. L’histoire des reflux gastro-œsophagiens qui m’ont torturé pendant des mois, me faisant craindre le pire. L’histoire des troubles au bas-ventre, effet du médicament anti-cholestérol que je prenais depuis des années. Tout cela s’est calmé, le jour où je me suis aperçu qu’en perdant vingt-six kilogs, je voyais la plupart des signaux d’alerte disparaître. Il fait de grands “Oh !”, il surréagit, il recrée un théâtre que j’ai déserté.



Pas de commentaire

Poster un commentaire