MALADIES (2)

Les rendez-vous avec ma psy se font maintenant au téléphone. Je suis mal à l’aise avec Skype, et au fond cela revient au même. Rien ne remplace, de toute façon, le poids d’incarnation d’une séance, la marche à pied qui la précède et qui la suit, l’ennui et la gêne qui la traversent. Au téléphone, on n’ose pas les silences, on a peur des temps morts. Je prends de ses nouvelles, je lui donne des miennes. Je lui dresse, de mes journées, un tableau édifiant, qu’elle ponctue de “ formidable !” censés me gonfler à bloc. Je fais le constat, qui n’est pas totalement faux, de l’effet bénéfique de cette vie recluse, pour moi qui ai toujours craint de demeurer seul avec mes obsessions. Je croyais à l’hystérie, à la mondanité champagnisée, comme remèdes à mon mal. Je m’aperçois que ces longues heures sans distraction me sont profitables.

Elle m’approuve, sans trop rebondir sur ces grands mots. Elle me parle de choses concrètes. Du Coronavirus, qui, selon son fils médecin, touche surtout des personnes âgées, ou atteintes d’une pathologie. Elle s’inquiète de savoir si je fais de l’hypertension. Quatorze neuf. Ce n’est pas beaucoup. Elle m’invite à respecter les mesures mises en place. On parle de la chloroquine (une de ses patientes, coincée à l’île de Ré au milieu de parents infectés, a pu constater l’efficacité de ce médicament). Je me reproche de ne pas évoquer des thèmes plus inactuels. Je songe à mon premier psy, qui, lui aussi, refroidissait mes ardeurs sublimes en me conseillant d’écrire sur les concierges.

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